La salle du Teatro Pavone de Pérouse était remplie à craquer. Les jeunes journalistes venus au Festival ainsi que nombreux journalistes italiens étaient là pour écouter celui qu’on considère désormais un gourou.
ProPublica, un site financé par des mécènes
Paul Steiger a été managing editor du Wall Street Journal pendant 26 ans, ce qui a fait de lui une pointure de l’économie au niveau mondial. En 2007, à son départ du WSJ, Steiger fonde ProPublica, organisation no-profit pour le journalisme d’enquête. Le site est financé par des mécènes, à hauteur de 10 millions de dollars par an. Les sujets produits par ProPublica sont vendus à la presse traditionnelle et publiés également sur le site. Chaque enquête est vue en moyenne par 60 000 personnes.
En trois ans, ProPublica est devenu une référence pour ce nouveau modèle de journalisme, et récemment a été connu par les gens du métier pour être le premier site d’information à avoir gagné le prix Pulitzer avec une de ses enquêtes.
Plus de 100 personnes travaillent pour ce site qui s’inscrit dans la grande tradition du investigative journalism américain. Mais il y a aussi 4000 reporters volontaires, un « enourmous potential« , qui aident et informent les journalistes sur les enquêtes qu’ils sont en train de suivre.
Le rédacteur en chef a ouvert son discours au Festival de Journalisme avec une liste de cinq points clés:
- les modèles éditoriaux traditionnels sont finis
- les « supermarchés » de l’information vont disparaître petit à petit
- l’innovation viendra de petites « boutiques » de l’information
- dans ce processus de changement, le journalisme d’investigation en sort affaibli
- le nouveau modèle de la recherche journalistique pourrait être le no-profit et « non-partisan »
Un nouveau modèle est-il possible ?
ProPublica fonctionne avec le mécénat, mais ce journalisme no-profit connaît d’autres expressions aux États-Unis, comme avec Spot.us et son système de fund rising. Ce site est un portail d’enquêtes, proposées au public sous forme de synopsis. Pour chaque enquête, on trouve un devis de ce que pourrait coûter sa réalisation. Les internautes peuvent alors voter l’enquête qui les intéresse le plus, et si ils le souhaitent, offrir de l’argent pour financer le travail du journaliste.
Ce modèle remet le lecteur-internaute au cœur de l’intention journalistique : on parle de ce qui intéresse vraiment le citoyen. Au-delà de la faisabilité de cette démocratie informative, ce système semble surtout assez lointain des discussions franco-françaises sur l’évolution du journalisme.
Si en France, on s’interroge plus sur la forme, avec le débat sur le web-reportage par exemple, ailleurs on semble être plus concentrés sur le contenu et sur le modèle économique qui aux États-Unis est affronté de façon directe et comme une priorité capitale.
Paul Steiger a aussi partagé l’expérience de sa rédaction, en racontant comment les journalistes venant des médias traditionnels apprennent les secrets des nouveaux médias par les jeunes, et vice-versa.
Il a affirmé croire aux projets qui viennent du bas, comme le journalisme hyperlocal. Pour finir, quand dans le public on lui a demandé quel conseil il donnerait à un jeune journaliste qui débute, le gourou a répondu tout simplement « Tirez le maximum de profit des nouveaux médias. Et gardez vos yeux ouverts. »
Le Festival de Pérouse
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