L’histoire est déjà ancienne (à l’échelle du web et de la blogosphère), mais elle mérite que l’on y revienne. Tout débute le 12 juin 2008. Associated Press demande au site Drudge Retort de retirer six articles et un commentaire. Ce site (conçu comme le pendant de « gauche » du Drudge Report) dont le graphisme n’est pas le souci premier, est un site communautaire, comparable à Digg ou Mixx, alimenté par quelque 8 500 internautes.
Robert Cadenham, le fondateur de Drudge Retort tombe d’autant plus des nues, que les extraits de dépêches incriminés varient de 33 à 79 mots (200 à 470 signes), qu’AP est cité, que des liens renvoient aux articles. Bref, pour lui, il n’y a pas violation du copyright, mais bien application du fair use, une forme de tolérance dont l’équivalent en France serait le droit de citation.
L’affaire enflamme la blogosphère américaine, où cette attaque est vécue comme la remise en cause d’une forme de gentleman agreement. Cadenham explique : « La culture extraits & liens que nous avons établi dans la blogosphère est la manière dont des millions de gens cherchent, évaluent et comprennent les infos. » Il reçoit l’appui, entre autres, de la Media Blogger Association, qui compte près de 1000 membres.
Très rapidement, AP fait marche arrière. Jim Kennedy, son vice-président et directeur de la Stratégie, joue l’apaisement : « Nous n’allons pas poursuivre les bloggers, car ce serait comme si nous poursuivions une grand-mère et des enfants pour avoir volé des CD. » Le 20 juin, un accord est trouvé et le calumet de la paix fumé…
La situation reste toutefois instable, car la « frontière » du fair use n’est toujours pas définie. Elle peut être remise en cause par AP, qui entend continuer à défendre le fait que l’agence est « créatrice de contenu […] et d’un contenu qui a de la valeur », comme l’argumente Jim Kennedy.
Pour l’instant, nous en sommes là, en attendant d’autres rebondissements. Ils sont inévitables en raison du poids sans cesse plus importants des réseaux sociaux comme Facebook, sur lesquels s’échangent des contenus…