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#3 Pérouse : L'aube d'un nouveau journalisme

Luca De Biase est un personnage atypique dans le paysage des médias italien. Fondateur et rédacteur en chef, de Nova24, le supplément hebdomadaire médias & technologie du quotidien économique Il Sole 24 Ore, il est aussi l’auteur d’un essai remarqué, Economia della felicità [L’Économie du bonheur]. Sa réflexion est au croisement de l’évolution technologique, de la culture et des évolutions sociales et économiques provoquées par les nouveaux médias. Autant dire que le salle du théâtre Pavone de Pérouse était pleine pour l’écouter évoquer « l’aube d’un nouveau journalisme », ce jeudi 22 avril 2010.

Pour Luca De Biase, l’évolution récente que viennent de connaître les médias est irréversible: « Nous sommes devant une nouvelle réalité et nous devons reconstruire. » Principales caractéristiques de cette « nouvelle réalité »:

Le rôle du journaliste est d’assurer la transparence de l’information

Dans ces conditions, quel est le rôle du journaliste professionnel ? Cet « artisan », n’est plus là « pour dire comment est le monde », mais  « pour assurer la transparence de l’information ». Plus que jamais, insiste-t-il, « nous avons besoin, d’une personne qui cherche les faits et puisse les transmettre. »

Cela signifie que nous devons aussi réfléchir au système de production de l’information, à cet écosystème, où travaillent des reporters, des editors [rédacteurs en chef] et des publishers [éditeurs]. Dans la presse papier, l’espace étant limité, les rédacteurs en chef doivent « couper » dans l’information, tandis que la « créativité est basée sur des actions répétitives ».

Internet change la donne, puisque « l’espace est illimité », avec comme seule frontière, « l’attention du public ». Dans cet espace, où les reporters ont tendance à devenir de plus en plus des auteurs, la « conversation » devient une donnée essentielle. « La technologie permet aujourd’hui, explique Luca De Biase, un feedback et des interactions continues ».

Le deuxième point important est le développement de nouveaux modèles économiques. Pour l’instant « nous sommes dans une phase de transition, dans un système qui a perdu toute direction. »

Il y a bien sûr la question de la publicité. Sur ce plan, les nouveaux médias sont en compétition avec les médias traditionnels (journaux, magazine, radio et télévision), sachant que ces derniers avec 6 milliards d’euros, se partagent la part du lion du gâteau publicitaire italien, qui est d’environ 8 milliards en chiffre d’affaires annuel.

Le bonheur n’est pas une valeur monétisable

Luca De Biase (DR)

Mais Luca De Biase s’interroge sur la validité d’un modèle économique financé uniquement par la publicité: « Celle-ci exige des résultats immédiats, or les résultats sont meilleurs quand de fortes relations se construisent entre l’auteur et le public », ce qui exige du temps.

Mais aussi et surtout, il remet en cause un modèle économique uniquement fondé sur les échanges monétaires: « Beaucoup de choses, comme le bonheur, ne sont pas monétisables » explique-t-il. Prenant en exemple Spot.us, où le financement des reportages est assuré par des dons, il explique que dans ce cas « l’argent n’est qu’un instrument pour réaliser quelque chose [des reportages], dont le but n’est pas de gagner de l’argent à la base ».

Luca De Biase pour continuer à défricher ce champ de réflexions, qu’il estime fécond, a créé un fondation [fondazione Ahref], qui sera aussi un lieu pour développer des innovations selon une logique « non lucrative ».

Pour aller plus loin

Le Festival de Pérouse

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